(don't let the world cave in)

L'effluve du café frais le poursuivit alors qu'il poussait la porte du Bosie Tea Parlor. L'endroit lui faisait souvent office de confessionnal. D'accord, confessionnal, c'était poussé, mais il s'y réfugiait beau temps mauvais temps pour griffonné ses moindres pensés dans ce carnet quelque peu décousu, à la couverture en cuire plus qu'ancestrale. Une tradition qu'il perpétuait depuis les dix derniers mois, après que sa psychologue lui ait fortement recommandé de s'offrir un instant de répit quotidiennement. Loin de chez lui, loin de sa femme, loin de ses filles, et loin du deuil qui ne semble pas près de le quitter. Il pensait à sa dernière rencontre avec l'intervenante psychiatrique lorsqu'une petite voix aiguë le tira de sa rêverie pour lui faire remarquer qu'il avait malencontreusement fait glissé son précieux carnet, le laissant à l'abandon sur l'asphalte bouillante. « Oui, merci. » Il la détailla un moment, tentant de mettre un nom à ce visage angélique, mais sans succès ; cette fille n'était pas du coin. « À qui ai-je l'honneur ? » souffla-t-il, alors que la demoiselle était sur le point de tourner les talons et de s'engouffrer dans la foule qui se faisait un peu plus dense en cette heure de diner.