leave a light on

(1.) Bercée à l'enfance par le chant des sirènes, ce n'était que les histoires de son père. Et des autres marins. Eux dont les âmes appartenaient aux flots plus qu'à la terre. Elle s'en souvient Caoimhe de ses après-midi sur le bateau de son père, le corps presque entièrement passé par-dessus bord, les jumelles autour du cou, le regard plein d'espoir à l'idée de trouver la première une de ces créatures. Elle aime la mer Caoimhe, plus qu’elle n’aime la terre, presque autant qu’elle aime la vie. Elle sait conduire le bateau qui appartenait à son père, elle sait naviguer sur un catamaran. (2.) Affection pour les fleurs, elle en ramenait à sa mère, recueillies sur le chemin de l’école, bouquet sauvage pour un sourire maternel, elle n’a jamais perdu son attachement pour ces beautés momentanées. Ses préférées, les pivoines rosées. Elle vous parle des fleurs comme on parle d'un amant perdu, avec nostalgie et amour. (3.) D’innombrables créations florales s’étalent dans la maison. Des bouquets inachevés, d’autres qui ne lui plaisent plus. Et cet arôme, si particulier, qui s’attarde dans l’air, mélange parfait d’effluve florale et de sel marin, qui enflamme l’odorat une fois la porte passée. (4.) Wexford, la ville adorée, elle y revient toujours. Maintenant devenue propriétaire de sa jolie boutique, elle y mets son âme chaque jour qui passe. Encore plus depuis la mort de son père, vaine tentative d’oublier quelques instants que plus jamais il ne rentrera au port. (5.) Elle a voyagé, deux années à Londres pour étudier, une année à New-York à ses vingt-cinq ans pour s'inspirer et s'émerveiller de la démesure. De loin elle préfère son Irlande natale, c'est à son retour qu'elle choisit de s'installer à Wexford pour de bon. (6.) Caoimhe est soleil, le sourire éclatant, il n'est pas rare d'entendre des éclats de rire sortir de sa boutique, de ce rire qui vous contamine le coeur. Bienveillance pure, presque maternelle et cette dévotion pour les autres, altruisme qu'elle tient de papa, de s'oublier un peu parfois. Curiosité rarement calmée, elle aime apprendre, il n'est pas rare de la voir se plonger dans un de ces livres que Julian affectionne tant ou un des ces films dont Fiona lui a parlé. (7.) Elle aime trop vite. Trop fort. S'attache sans se poser de question et le lendemain se rend compte que ce n'était pas le bon. Avec ces valeurs elle veut croire que l'amour gagne toujours, comme dans ces comédies romantiques qu'elle ne se lasse jamais de regarder. Elles finissent toujours bien, ou presque. Caoimhe veut son happy ending. Pour l'instant, seul reste le sentiment âcre qu'elle est destinée à perdre son coeur. (8.) Douce enfant qui voyait bien trop la vie en rose, innocence qui lui colle à la peau encore, dont elle ne peut se défaire. Elle pense toujours que tout fini par s’améliorer, l’éternelle optimiste. (9.) Living healthy comme mantra, elle aime les smoothies healthy et le thé matcha. Ses frères et soeurs sont les premiers à expérimenter ces nouvelles trouvailles culinaires, pour le meilleur mais surtout pour le pire. Elle n'a jamais prétendu être bonne cuisinière, c'est la cuisine qui ne veut pas d'elle. Faudrait-il encore qu'elle suive les recettes au lieu d'en faire qu'à sa tête.  Caoimhe préfère improviser, à sa sauce comme elle aime le répéter, tel les grands chefs de ce monde. Elle ne peut pas dire non à un morceau de chocolat. (10.) Footing matinaux au bord de l'eau, ce n'est pas la plus sportive, elle aime beaucoup le calme de la ville avant l'éveil, le bruit des vagues contre les rochers. Elle s'est même mise au yoga, depuis deux ans. Sa dernière lubie, le pilâte. (11.) Elle aura une famille un jour. Un mari, des enfants, une maison et un chien dans le jardin. Elle en est convaincue parce qu'elle veut les dimanches après-midis les emmener sur leur bateau et parler à ses enfants de l'homme qu'était son père.