supermarket flowers (luke)

wexford. son nouveau départ, son nouveau chez elle. loin des drames et du faste de singapour, petit cocon niché au coin d’une falaise irlandaise, abritant ses habitants des vents, des marées, et son cœur brisé. elle avait oublié le charme de la petite ville, evie, sa douceur de vivre, sa simplicité authentique. elle y avait oublié les rires d’enfants, les souvenirs de vacances et son optimisme innocent et est venue les récupérer. déterminée à reconstruire une vie, à recoller les débris de son cœur éclaté par la douleur et les cris, elle s’installe dans son propre appartement pour la première fois, seule dans sa liberté. son inexpérience ne lui fait pas peur, au contraire ; désireuse d’apprendre à découvrir la normalité d’une existence simple mais réelle, elle rit de ses erreurs avec la candeur d’une enfant, surtout en cuisine. et même si l’impatience bout parfois dans ses veines et qu’elle a très envie de jeter ses plats ratés par la fenêtre, elle se contente de grimacer et de vite jeter ses cookies brûlés à la poubelle. personne n’en saura jamais rien, de toute manière.

après avoir réussi à faire cuire ses premières pâtes et à sauter ses premiers légumes, elle relève le niveau de son ambition et cherche maintenant à retrouver les saveurs de sa maison. elle aime autant qu’elle déteste singapour, ses hypocrites ultra-riches ne sachant que faire de leur argent et de leur vie, mais elle ne peut que regretter les milles et une saveurs qui ont peuplé les repas de son enfance et de son adolescence, du riz parfumé aux innombrables épices qui sont la raison même de sa gourmandise. ayant décidé d’explorer sa passion pour la gastronomie et la cuisine, elle envisage de suivre des cours, mais en attendant de trouver un professeur qui supporterait ses gaffes et son manque d’expérience, elle trouverait par elle-même un moyen de recréer les saveurs si spécifiques de ses plats préférés.

evie se retrouve donc à arpenter les allées du supermarché local – quelque chose qu’elle ne pensait jamais faire dans sa vie, en quête de quelques produits exotiques et familiers. ayant déjà mis la main sur de la sauce soja et du lait de coco, elle s’engouffre dans le rayon des épices, en quête d’une poudre de piment (vraiment, n’importe laquelle ferait l’affaire). son regard parcourt les étiquettes des produits avec perplexité, avant qu’il ne soit attiré par un nom familier – laksa. Bingo. Etonnée de voir de la pâte de laksa vendue dans un petit havre de paix irlandais, elle cherche à saisir le pot sur l’étagère du haut. Sans succès. Jamais aussi frustrée par son mètre soixante-deux, elle se met sur la pointe des pieds et effleure le pot tant convoité du bout des doigts sans parvenir à l’attraper.